Troupeaux
Marc Chopy
09/04/2022 > 22/05/22
L’exposition Troupeaux, de Marc Chopy, est un ensemble d’oeuvres: sculptures, peintures, dessins, carnets, impressions sur tissu, datant de 1992 et de 2022.
❝ Troupeaux s’ouvre et se conclut sur la guerre de la Russie contre l’Ukraine. L’instance de l’histoire est vouée à la haine, à l’effondrement. Comment rajouter du malheur à la détresse, voir la plaie d’une disparition annoncée suppurer d’une infection supplémentaire que la guerre, en maîtresse exigeante de déséquilibre, va surdévelopper. Notre économie de compétition et de pouvoir est fondée sur la haine et l’égoïsme. Les désirs de conquête territoriale par appropriation illégitime se fondent par un aveuglement sur notre monde fini. La haine vise à la destruction totale, elle ajoute à la défaite de l’autre, sa propre défaite, son “morfondement”, sa dissolution. Peut-être que l’humanité a compris ses limites, a deviné sa fin et se glisse avec jouissance vers cette épiphanie de la perte, qui serait comme une sorte d’embolie de l’histoire de l’humanité. Tout acte de destruction, où des forces en opposition se répondent par les armes, contribue un peu plus
à l’effacement de la nature qui est notre maison commune et universelle, à sauvegarder coûte que coûte. C’est d’un amour global du monde dont nous avons besoin: tous les êtres, toutes les choses, tous les phénomènes. Nous avons besoin de cette résilience pour nous adapter à ce devenir sombre, si obscur et tourmenté, qui est celui de notre terre.
La haine nous entraîne vers le désert, elle fait entrer le désert par la fenêtre du ciel, elle assèche même notre cordialité d’être au monde. Mais de surcroît, elle raréfiera notre nourriture, nos plaisirs, nos amitiés naturelles vis à vis des animaux, des plantes, des insectes, de l’eau, de la pluie, de la neige, du soleil.
C’est une cavalcade des détresses qui se joue dans le cours obsédant de la vie, sur toute la surface de la planète, dans toute sa géographie politique. Depuis ce lieu, dans la douceur de l’art, que j’invente chaque jour, la mondialisation est là, malgré moi, malgré le bout de nature que j’envisage depuis la vigie de ma maison. Cette mondialisation pèse sur le cours de ma vie et donne à mes gestes beaucoup plus de sens qu’il semble y en avoir en apparence. Créer, est-ce encore rassembler de l’espoir pour que la réalité nous
apparaisse meilleure que ce qu’elle n’est ? Ainsi, simplement dans un souffle de temps, pour l’embellie de quelques secondes. ❞
Marc Chopy, extraits du livre Troupeaux, paru à l’occasion de cette exposition, au éditions Contrepoids.