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Aucune Tenue

Diane Gaignoux
curatrice Elora Weill-Engerer

15/06/2024 > 28/07/2024

❝ Etre " sans tenue " peut à la fois désigner l’absence totale de vêtements ou, au contraire, l’inconsistance de ceux-ci, leur caractère négligé ainsi que le comportement inapproprié ou déplacé de la personne qui les porte. Un vêtement qui ne garde pas sa forme pourra être décrit comment n’ayant " aucune tenue ". Ainsi, on ne fera pas remarquer à l’empereur qu’il est tout nu mais on dira à la personne qui ne respecte pas les codes vestimentaires qu’elle n’a " aucune tenue ".
Pour Diane Gaignoux, cette notion se transforme en une exploration poétique et psychologique du vêtement non conventionnel. Il en va, chez elle, d’une énergie du vêtement effiloché, débraillé ou outrancier. Dans sa mollesse ou son excentricité, le costume devient l’inverse de la " coutume ", dont il tire pourtant son étymologie : il est un sondeur et un amplificateur d’émotions, offrant une enveloppe et une forme pour les contenir. La figure de l’écorché qui représente, chez Roland Barthes, l’amoureux à vif et épidermique (Fragments d’un discours amoureux) peut être utilisée ici comme symbole du costume-peau-retournée qui ramène à la surface la vie grouillante des émotions. Entre le contenant et le contenu, il n’y a plus de distinction. On parle alors d’affects, qui se véhiculent sur et non pas seulement dans le corps : on rougit de timidité, on bleuit de peur. Et comme au théâtre, ça se voit. Romeo Castellucci metteur en scène connu pour ses costumes excentriques déformant les corps des acteurs, a formulé le concept de " costume de peau ". Inspiré par le concept de " moi-peau " développé par Didier Anzieu, Castellucci considère le costume comme une seconde peau qui fusionne avec le corps de l’acteur, créant une nouvelle identité. Le " costume de peau " de Castellucci symbolise cette transformation théâtrale où le vêtement devient une extension vivante du corps, une métamorphose de l’identité et une simulation des vulnérabilités cachées.
Ainsi, la tenue nous permet de changer de corps, de l’amplifier ou de nous y recroqueviller comme dans un refuge. " Ce que je porte " est ce que je choisis d’emporter avec moi : la manche de la veste se transforme en abri-tunnel et à son revers s’accrochent nos souvenirs. On pense à ces espaces poétiques qui sont des prolongements de la maison - la coquille ou la tente - sanctuaires intimes essentiels pour le développement de l’imagination et de la rêverie (Gaston Bachelard, Poétique de l’espace). Ici, tout indique que mon enveloppe est habitée par d’autres que moi. Mais la tenue peut aussi s’abandonner derrière soi comme une mue. Elle se fossilise pour prendre la forme d’une chrysalide éclatante et fragile, comme étonnée de se trouver là. Ailleurs, elle est celle d’une icône déchue qui force l’apparat pour re-goûter au plaisir du regard sur soi ou, comme la méchante sorcière de l’Ouest, celle qui fond tel un sucre. Le vêtement enfin s’épaissit, comme une peau adipeuse devenue aussi rêche que du cuir sous l’usure du temps. Toutes les étapes de la vie sont contenues dans celles des matières, opaques ou transparentes. Le courant est fluide, les mutations non fixées dans un état : la couleur infuse, afflue pour faire battre les organes du matériau, par contamination et capillarité. Et le vêtement ingère, digère et suinte cette couleur comme un corps vivant ou un fruit gorgé de soleil. ❞
Elora Weill-Engerer, 2024.

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